Homélie – 31ème dimanche du Temps Ordinaire

Avant-hier, le prêtre qui présidait la messe portait une chasuble blanche. Hier, sa chasuble était violette. Aujourd’hui, elle est verte. C’est qu’après la fête de tous les saints et la célébration en mémoire des défunts, nous revenons maintenant à ce que l’Eglise appelle le Temps ordinaire…  Avec quel message allons-nous repartir ce matin pour avancer vers Dieu sur le chemin de la sainteté à la suite de tous ceux qui nous ont précédés ? « Ecoute Israël : le Seigneur ton Dieu est l’Unique. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force ». Cette parole est mise dans la bouche de Moïse. Jésus la reprend à son compte dans ce passage de l’évangile selon Marc que nous venons d’entendre. Arrêtons-nous un instant sur trois expressions-clés : Ecoute ! Dieu est l’Unique. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu…

Ecoute !
L’écoute est une des toutes premières relations que l’enfant instaure avec son entourage avant même sa naissance. Il entend et il écoute. Son esprit s’éveille au son de la voix, de la musique ou des bruits.
C’est aussi l’expérience qu’a connue le peuple juif au moment de sa naissance comme peuple choisi par Dieu : « Shema Israël ! Écoute Israël » C’est pourquoi, dans la tradition des juifs croyants, cette parole est encore reprise chaque matin.
Cet appel à écouter est toujours actuel. Voici par exemple les premiers mots qui introduisent la règle de Saint Benoît chez les moines bénédictins et cisterciens : « Écoute, ô mon fils, les préceptes du maître et incline l’oreille de ton cœur »
Plus récemment, dans le document final du 26 octobre 2024, le synode sur la synodalité évoque la possibilité d’instituer dans l’Eglise un ministère de l’écoute.
En effet celui qui écoute sait qu’il ne sait pas, qu’il a besoin d’apprendre et de comprendre. Il évite ainsi deux attitudes : celle du dogmatique qui n’écoute pas car il prétend connaître la réponse ; celle du sceptique qui n’écoute pas car il prétend qu’il n’y a pas de réponse.
Pourtant, Dieu continue de nous parler à travers tous les faits et gestes de nos vies et de nos rencontres. Mais il nous faut apprendre de Jésus la façon d’écouter. Et ce qui a guidé Jésus dans sa vie sur les routes de Palestine, c’est l’attention à son Père et l’écoute des personnes rencontrées, en particulier celle des pauvres, des marginaux et des exclus.
On l’a entendu dimanche dernier dans le récit de l’appel de Bartimée que Jésus a écouté malgré ceux qui voulaient le faire taire. Oui, écouter à la manière de Jésus, c’est apprendre Dieu par les autres avec beaucoup d’humilité. La première invitation de ce jour n’est-elle pas pour nous d’apprendre à mieux écouter ?

Dieu est unique !
C’est la foi proclamée par les trois religions monothéistes : le judaïsme, le christianisme et l‘islam.  Pour les Juifs, nous venons de l’entendre, Le Seigneur notre Dieu est l’Unique. Dans l’évangile de Marc, Jésus lui-même reprend à son compte ce verset du Deutéronome. On retrouve la même affirmation de foi en un seul Dieu dans les lettres de Jean, Jacques ou Jude.  De son côté, Paul y revient plusieurs fois, notamment dans sa première lettre à Tite – Je cite : Il n’y a qu’un seul Dieu ; il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, le Christ Jésus. (1 Ti 2, 5).
Après les deux premiers conciles œcuméniques de Nicée et Constantinople au 4ème siècle, l’Eglise retient une formulation de la foi chrétienne qui fait toujours référence. Nous la connaissons bien. Elle commence par ces mots : Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible.
Pour les croyants, l’affirmation d’un Dieu unique suppose que l’on rejette tous les autres dieux du monde actuel : argent, pouvoir, séduction, bien-être, politique, mode, etc. Alors, la deuxième invitation à retenir aujourd’hui, n’est-elle pas de remettre Dieu à la première place dans notre vie ?

Tu aimeras !
Pour une fois, Jésus répond à un scribe sans recourir à une parabole. A la question posée par un connaisseur de la Loi, il répond par deux versets du Premier testament. Celui du Deutéronome que nous avons entendu dans la première lecture. Auquel il ajoute un verset du Lévitique : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. En rassemblant ces  deux versets séparés dans les textes, Jésus montre qu’ils ne font qu’un. D’ailleurs, dans sa propre vie publique en Palestine, lui-même n’a jamais dissocié l’un de l’autre. Il a maintenu une relation permanente avec son Père. Il n’a jamais cessé d’accueillir, d’écouter et de soulager les personnes qu’il a croisées ou qui venaient à lui. Il a été particulièrement été attentif aux plus fragilisées, par la maladie, le deuil, le péché ou l’exclusion sociale. Son amour inconditionnel l’a conduit à donner sa vie jusqu’au bout. Fils de Dieu, frère des hommes, il s’est offert en sacrifice une fois pour toutes, devenant ainsi le grand-prêtre qui nous ouvre les portes de l’éternité. C’est pourquoi il est capable de sauver d’une manière définitive ceux qui, par lui, s’avancent vers Dieu.
Alors, que manque-t-il à ce scribe qui, selon Jésus, n’est pas très loin du royaume de Dieu ? Nous ne le savons pas exactement. Mais pour ce qui nous concerne, nous pouvons nous rappeler ce conseil de l’apôtre Jacques dans sa lettre aux premiers chrétiens : Mettez la parole en application. Ne vous contentez pas de l’écouter.

Ecoutons donc la troisième invitation que Dieu nous envoie ce matin : une invitation à aimer notre prochain avec le regard bienveillant que lui-même porte sur chacun de nous. Alors, avec le psalmiste et avec tous les saints du ciel, nous pourrons chanter encore : Je t’aime, Seigneur, ma force. Dieu mon libérateur !

Hubert Ploquin, diacre